Bonjour à tous,
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Gerd Altmann Pixabay
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il y a quelques temps, un débat a éclaté sur Twitter sur l'opportunité ou pas de mettre des TW dans les romans et je voulais revenir sur ledit débat.
Alors, déjà, qu'est-ce que sont les TW ? Ce sont des Triggers Warnings, en français des avertisseurs de déclenchement. Ce sont des avertissements censés prévenir l'utilisateur que le contenu qu'il va lire ou visionner contient des éléments déclencheurs d'un rappel de traumatismes, genre araignées en goguette ou massacre avec une tronçonneuse, ce type de joyeusetés...
La question sur Twitter était de savoir s'il fallait utiliser les TW, au nom du respect de la sensibilité des lecteurs, ou au contraire, les éviter, histoire de ne pas infantiliser son lectorat.
Ce débat se déroulait à un moment particulier pour moi, car je venais juste de rééditer La Pucelle et le Démon. Et ceux qui l'ont lu savent qu'il contient certaines scènes qui peuvent heurter, disons, la sensibilité des plus jeunes. Je me rappelle du rouge aux joues de mon paternel quand je lui ai demandé ce qu'il en avait pensé et qu'il s'est étonné de certaines scènes que j'y avais écrites. Ce n'est qu'alors que j'avais tilté que bon, voilà quoi... Ahem....
Pourtant, jusqu'à ce que je lise ce débat sur les TW, j'avoue que je ne m'étais pas spécialement posé la question de savoir si La Pucelle et le Démon pouvait tomber sous des regards préparés ou pas. Pour moi, c'était limpide, simple. Le roman était classé en littérature adulte et donc, c'était des adultes qui allaient le lire et, du coup, ils étaient forcément préparés à encaisser. C'était des adultes, quoi. Et puis, bon, ce n'est pas un roman d'horreur non plus. Il ne contient pas de scènes de sexe débridées... Il y a des romans bien plus atroces dans leur description de certaines scènes et des programmes télévisuels qui exhibent bien plus d'images de sexe et de violence. Non, vraiment, je m'estimais petit joueur sur ce coup...
Et puis, j'ai songé à cette amie victime d'une agression sexuelle et qui semblait apprécier mes écrits. Avait-elle lu mon roman ? Est-ce qu'elle avait été choquée ou pire, avais-je fait remonter chez elle un traumatisme ? Et les autres ? Ceux que je ne connaissais pas, dont je ne connaissais pas le passé ? Est-ce que je pouvais décemment laisser des lecteurs et lectrices tomber, sans prévenir, sur certaines scènes ?
Clairement, pour moi, c'était non ! Mais comment m'y prendre ?
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Adina Voicu Pixabay |
Parce que les TW, c'est bien, mais cela revient à établir une liste de tous les traumatismes que le roman pourrait potentiellement induire. Et clairement, il est impossible de connaître ou même d'imaginer tous les traumatismes vécus par une personne. Pour preuve, un de mes proches a la phobie des papillons de nuit... et à mon avis, c'est pas courant. Mais quand il raconte pourquoi, je peux vous assurer qu'à sa place, moi aussi, je serais phobique des papillons de nuit... Brrr... Bref, une liste de TW sera forcément non exhaustive. On me rétorquera que peu importe, qu'au moins, j'aurai fait une liste des peurs les plus courantes... Je répondrai que je me sentirais coupable de laisser penser à un lecteur potentiel qu'il peut ouvrir mon roman sans frémir, en toute confiance, et qu'il le referme, rempli d'effroi, parce que je n'ai pas songé à sa phobie particulière. Et puis, je ne sais pas vous, mais perso, j'estime que certains mots peuvent aussi bien servir de déclencheur que la scène d'un roman. Si je dis à mon proche qu'il y a des papillons de nuit dans mon roman, même si je ne lui en donne pas les circonstances précises, ça m'étonnerait que cela n'évoque pas l'insecte pour lui, et que cela ne lui rappelle pas de mauvais souvenirs. Du coup, faire une liste avec "papillon de nuit" dedans, je trouve ça un peu maladroit. Et puis, cette idée de décortiquer un roman, de l'analyser dans ses moindre détails et d'en exposer les entrailles, façon pièce de viande sur les étals d'un boucher, pour en extirper tous les traumas possibles, ça ne me disait définitivement rien. C'est clairement pas mon truc...
Mais tu avais dit que tu voulais prévenir tes lecteurs et lectrices ! Tu l'as dit !
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Pegi |
Mouais... Vous aussi, vous regardez des films et des séries à la télé ou sur les plateformes de streaming, genre Netflix ou Amazon Prime Video ? Vous avez remarqué la signalétique jeunesse ? Ces interdits aux moins de 10, 12, 16 et 18 ans ? Bon, je vais vous avouer un truc... Je suis empathe et, du coup, j'ai beaucoup de mal avec les images violentes. Sans aller jusqu'à ressentir la douleur de la victime, je m'imagine assez bien la chose et... je préfère éviter ce genre d'œuvres... Jusqu'ici, je me basais sur la signalétique jeunesse. Et oui, il n'y a pas de signalétique adulte. Je vous l'ai dit, un adulte, ça supporte tout... (ironie inside). C'était simple. Quand c'était interdit aux moins de 16 ans, c'était niet... mais il est arrivé que je ne visionne pas un film ou une série alors qu'en fait, je pouvais très bien supporter les images parce qu'il n'était pas question de violence interdite aux moins de 16 ans. D'autres facteurs, comme le sexe ou la nudité, par exemple, imposaient cet avertissement. Du coup, comment savoir ? Bon, pour le sexe, c'est assez évident... mais pour le reste ?
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Homelander (Antony Starr) |
Et dernièrement, est apparu sur Netflix, des précisions sur ce qui motivait leur signalétique jeunesse : sexe, drogue, langage grossier, nudité, violence, sexe violent, discrimination... Du coup, mon problème était résolu. Je savais à quoi m'attendre et je savais ce que je pouvais regarder ou pas. J'ai même décidé de regarder
The Boys ! Parfois que d'un œil et d'une oreille, mais je l'ai fait... Bon, pas encore toute la saison 2. Aussi, merci de ne pas me spoiler...
Mais... mais... tu disais être contre les TW et finalement, tu apprécies quand on te détaille... C'est vrai. Ca peut sembler contradictoire, mais en fait, non. Netflix catégorise sans entrer dans le détail. Et cette façon de faire me convient nettement plus qu'une longue liste détaillée.
Du coup, j'ai voulu faire pareil pour mon roman et je me suis posé la question de savoir ce qui pouvait amener une lectrice ou un lecteur à ne pas apprécier sereinement La Pucelle et le Démon. En fait, c'était assez évident. Il y a des scènes de sexe à ne pas mettre entre toutes les... sous tous les regards, des luttes violentes inévitables en cette guerre de Cent Ans, et Sidoine et Arkshaar, son démon, font de nombreuses compétitions de jurons fleuris.
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Pegi |
Mais est-ce que je pouvais décemment n'indiquer ainsi que les points "négatifs" de mon roman ? Si je mettais une annotation précisant qu'il y avait de la violence, du sexe et des jurons, est-ce que je n'allais pas attirer des lecteurs venus là uniquement pour le sexe ou la violence et qui seraient frustrés par leur lecture ? Est-ce que je ne dégoûterais pas un lecteur ou une lectrice lambda alors que le roman est surtout axé sur la romance, l'humour et un petit bout de femme, Oriane, qui, avec courage et pugnacité, tient tête à tous ces mâles testostéronés ? Clairement, ça n'allait pas. Si je devais évoquer les points licencieux, il fallait également que je présente les attraits du roman.
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Couverture de Pascal Quidault |
Du coup, voici l'avertissement que j'ai concocté pour Amazon.
À lire si vous aimez :
- les personnages féminins forts
- les romances sans eau de rose
- l’humour
À éviter si vous détestez :
- la violence d’un champ de bataille
- le langage ordurier
- les relations charnelles grivoises
Ainsi, plus d'erreur possible... et j'espère plus de trauma...
Et vous, lecteurs et lectrices, auteurs et autrices ? TW ou pas TW ?
A bientôt